J’ai marché avec Jai Jagat 2019-2020
En 1993, lors de mon premier voyage en Inde, j’ai rencontré Yann, un français qui travaillait pour l’Alliance Française d’Ahmedabad. Gandhien, il me proposa des marches pour la paix dans le pays, mais, à l’époque, je voulais découvrir le pays dans un train d’enfer et je voyageais beaucoup en train. Avec mes idées fixes, ça ne m’est pas sorti de la tête, et voilà que, vingt-six ans plus tard, je marche avec Jai Jagat. Mais qui est-ce donc ? Le mouvement « Jai Jagat » (victoire pour le monde entier en hindi) est une initiative de Rajagopal P.V., un septuagénaire qui marche dans son pays depuis cinquante ans pour la paix, l’écologie, le droit des femmes, les petits paysans, les opprimés, dalits, en sanskrit, les premiers habitants, adivasis, aussi en sankrit et pour bien d’autres causes. Il a pour but de s’étendre au monde entier d’ici 2030, un vaste idéal qui m’a motivé. Ainsi, en octobre 2019, je suis de nouveau sur les routes d’Inde, mais cette fois-ci avec une cinquantaine de personnes des cinq continents pour propager les valeurs du Mahatma Gandhi.
Comment en suis-je arrivé là ? C’est Yann, que je n’avais pas revu depuis mon premier voyage qui m’en parle un an auparavant. Nous devions marcher environ 10 000 km de Delhi jusqu’aux portes de l’ONU à Genève, mais avec les tensions entre l’Inde et le Pakistan et la Covid-19, nous n’avons pu marcher seulement 2500 km en Inde, en Arménie, en France et en Suisse.Ce fut malgré tout un premier pas vers plus d’humanité et une grande amitié née entre les marcheurs venus de dix pays différents, où tous les continents étaient représentés.
Ainsi, l’année dernière pour rendre visite à mes amis indiens, j’ai parcouru 10 000 km essentiellement en train, non pas de Delhi à Genève mais rien qu’en Inde. Ces marcheurs sont établis aux quatre coins du pays, même si l’Inde ressemble plutôt à un triangle pointé vers le sud. C’est une longue histoire d’amitié, qui n’est pas finie et me ramènera toujours, je le pense, vers cette terre lointaine. En 2021, j’ai coréalisé un film à propos de Jai Jagat de quarante minutes que je posterai bientôt.
Influence et expériences indiennes depuis l’enfance
Il y a presque vingt ans, déjà, Michelle, qui m’avait conduit jusqu’à la confirmation par l’évêque de Pontoise pendant mon adolescence, me demandait pourquoi je retournais toujours en Inde. Je lui répondis, qu’il n’y avait pas de hasard et que tout jeune, « des signes » m’avaient mené vers ce pays. Si je voulais approfondir la connaissance d’un lieu qui fait presque sept fois la France en superficie, je devais y retourner régulièrement et, de plus, à l’époque, j’étudiais l’anthropologie avec Mélanie, une spécialiste du Sikkim à Montpellier. Ces signes comme des totems, des révélations qui m’ont conduit petit à petit vers ma passion pour l’Inde, sont : Mowgli, dans Le livre de la jungle, puis, Gandhi dans le film éponyme, l’éléphant qui est encore mon animal préféré et à quinze ans j’ai découvert avec la classe de 4è le Brighton Pavilion. Tant de « présages » m’ont poussé à partir pour un long voyage dans ce pays, où j’ai débarqué le trois décembre 1992. Malgré une longue série de conflits entre Musulmans et Hindous, suite à la destruction d’une mosquée trois jours après mon arrivée, le processus était enclenché et depuis je cumule environ trois années passées sur le sol indien.
2007 fut vraiment mon immersion dans l’Inde « profonde », en me rendant à pied à la source du Gange, accompagné d’un jeune hindou Rambeer qui s’était attaché à moi. Il me surnomma Bhola, un des nombreux épithètes du dieu Shiva, qui signifie : « le naïf un peu fou, fou mais sincère de coeur ». Il m’invita ensuite chez lui où je lui ai donné un coup de main dans les champs et je fus même le seul invité étranger et témoin d’honneur lors de son mariage. Un mariage arrangé, comme c’est le cas pour soixante quinze pourcent des Indiens. De fil en aiguille, je finis par participer à une grande marche gandhienne sur plus de mille kilomètres dans le centre du pays en 2019.
Cette marche fut l’un des plus grands moments de ma vie, lorsque j’en fait le bilan de quinquagénaire.
Expérience népalaise depuis 1993
Mai 1993, j’arrive pour la première fois à Katmandou, avec une nostalgie hippie. La capitale népalaise a commencé son développement économique chaotique et elle se noie déjà entre consommation pour ceux qui peuvent et tourisme de masse de trekking. A Pokhara, à 202 km plus à l’ouest, l’ambiance est déjà plus décalée. On peut se baigner dans le lac, les pédalos ne sont pas encore arrivés, le lac Phewa n’est pas encore pollué et il n’y a pas foule. J’ai fini le trek du camp de base de l’Annapurna I, j’ai marché cinq jours avec Robert un bavarois et autant seul. Un soir, alors que nous sommes dans une cahute qui nous sert d’auberge, je pousse un cri entre la joie et la démence, une façon de me soulager après avoir lâché mon sac à dos beaucoup trop lourd. Mon compagnon, et non cousin germain, décide de me surnommer Yéti. C’est ainsi qu’on me nommera durant les balades que nous effectuerons autour du lac pendant la relâche, lors de nos nombreuses balades à bicyclette.
Never End Peace And Love, tel est l’acronyme du Népal. Je retournais ensuite dans la fournaise de la plaine gangétique juste avant la mousson, « oubliant » le Népal pendant douze ans.
Septembre 2004, je fais la connaissance de Karsang, un Népalais du peuple Tamang, grâce à une professeure d’anthropologie. J’étudie cette discipline à l’université de Montpellier et mon enseignante a réussi à le faire venir en France. C’est ainsi que je me tourne de nouveau vers le pays du yéti. L’année suivante, je rend visite à Karsang à Katmandou, ensuite il revient régulièrement en France, jusqu’à ce que je le conduise avec sa femme en Espagne en 2012. Cette même année, je fais découvrir le Népal à mon père, j’explore de nouvelles pistes, et créé un petit trek non loin de la capitale. Je découvre les Tamangs, fait découvrir le pays à quelques Français en petit comité jusqu’à un mois avant la crise Covid.
La crise passée, je retourne cinq mois au pays de l’Everest en 2024, expérimentant un long séjour en monastère bouddhiste, travaillant dans les champs avec mes amis tamangs et parlant de mes expériences à des collégiens de l’agréable petite ville de Dhulikhel, à trente kilomètres de la capitale.
Mes aventures népalaises ne sont pas finies et prochainement je guiderai de nouveau les personnes qui le souhaitent là-bas.