Je qualifierais ma philosophie de vie par le concept de « La joie ordinaire », qui peut nous conduire vers un avenir désirable. A bientôt cinquante quatre ans, j’ai réalisé un parcours assez atypique. Ayant voyagé jeune, avec mes parents, j’ai développé un désir de connaissance des Autres1 intarissable. Un premier voyage initiatique et solitaire, en Inde et au Népal à l’âge de vint et un ans me bouleversa à jamais, ce qui me fit intégrer rapidement le clan des « Fous de l’Inde »2. Vivre des moments de joie extraordinaire assez jeune, dû à de grands chocs émotionnels et culturels procurent souvent, c’est le risque, une forme de nostalgie dépressive lors du retour à ce qui nous semble la banalité. Grande erreur parce qu’à travers toutes mes rencontres, j’ai découvert des personnes heureuses dans leur vie quotidienne alors que pour moi vivre un tel quotidien m’aurait semblait être un esclavage. N’étais-je pas moi, même esclave de ma bougeotte perpétuelle, à la recherche de l’impossible ?

Ainsi depuis plus de trente ans, je vis de travaux ponctuels afin de m’octroyer du temps pour les voyages et les études. Ces dernières m’ont conduit à une maitrise d’anthropologie obtenue à Montpellier en 2007 et mes pérégrinations m’ont mené sur les cinq continents où j’aime encore photographier les portraits de mes contemporains.

Passionné d’histoire-géographie depuis l’enfance ainsi que de la vie des autres3, j’ai développé un gout pour les biographies et c’est après ma premier vision du film « Gandhi4 » en 1985, en cours d’histoire-géographie que je me suis intéressé au Mahatma. Presque trente ans plus tard, je présentais mon diaporama « Sur les Traces des Mahatmas » au festival du voyage lent du Caylar en Larzac5. Au cours de cette conférence en direct, je démontrais que les Grandes Âmes, ce que veut dire Mahatmas en sanskrit6, ne sont pas forcément que les sages comme Gandhi mais peuvent être aussi le pakistanais, l’indien, le sri-lankais ou le népalais moyen, qui inlassablement répète le même geste dans une joie ordinaire, à l’exemple du « chaïwallah7».

Aujourd’hui, je souhaite rendre hommage à mes concitoyens, concitoyennes qui possèdent aussi cette joie ordinaire et qui ne sont parfois que mes tout proche voisins. C’est pour ça, que je vous propose mes écrits, mes photos, mes films et aussi de vous m’accompagniez dans mes voyages, si vous le souhaitez ?

Il y a la grande question de savoir si nous souhaitons vraiment un monde plus désirable ou si nous voulons rester accroché à nos vieilles habitudes ? Il y a, à l’ombre des grands médias, des personnes qui oeuvrent modestement à un monde meilleur, souvent, même, sans, s’en rendre compte, tout simplement par leur façon de vivre. Ils ont une vie simple et heureuse, ils sont économes non pas par avarice mais parce qu’ils savent la valeur des choses et la fragilité du vivant.

A travers diverses portraits de personnes que j’ai rencontré sur mon chemin, long et sinueux et que je qualifierai de sages des temps modernes, je proposerai un changement de paradigme. Sans être fermées et sectaires, ces personnes visent plus d’autonomie (énergétique, sanitaire, alimentaire et même dans leur mode de déplacement) et d’écologie. Il ne va pas sans dire que cela demande un effort, face à cette société de consommation qui constamment nous envoie des signales pour nous détourner de nos véritables désirs. Et pourtant pour beaucoup de ces « petites gens » l’effort n’est juste qu’habitude, une bonne habitude prise depuis longtemps.

Ils sont paysans, de souche ou néo-ruraux, bergers, artisans, bâtisseurs, artistes, chômeurs, voyageurs, marcheurs, cyclistes, poètes, clowns, garagistes, moines, professeur de Qi Gong et bien d’autres choses mais avant tout ils sont eux-mêmes, épargnés par l’illusion de la mode et libre du « quand dira-t-on ? ». Souvent pauvres de par leurs revenus mais riches d’humanité, ils cultivent sincérité, joie, sérénité et générosité.

Parler des personnes qui vivent simplement et sont heureuses de petits riens, c’est ça pour moi la joie ordinaire. S’émerveiller devant un flocon de neige ou une fleur printanière est un plaisir gratuit qui les comblent alors que d’autres dépenseront beaucoup d’argent pour un séjour au Club Med ou voir un film dans un cinéma Multiplex. Ils vivent dans le luxe, le vrai luxe, celui de contempler la rosée du matin à la lumière du soleil levant ou de se plonger dans l’eau froide d’une rivière de montagne pour se revigorer alors que des riches citadins trop affairés par la rentabilité de leurs activités, payeraient cher pour connaitre de tels plaisirs.

Face à un monde en crise sur tous les plans, prendre en exemple, ces personnes simples et joyeuses, qui acceptent leurs paradoxes, nous offre un contre modèle, de celui qui nous est imposé par les Mass-médias, à savoir celui des stars du show-business, du sport et des affaires. Ce dernier, modèle globaliste généralisé créé de nombreuses frustrations sur grand nombre de populations prises dans les problèmes du quotidienne de plus en plus difficile, et qui sont trop peu informés des voies alternatives ou n’y croient pas.

Ces personnes, nous montrerons que la réussite n’est pas d’avoir pleins de biens et d’argent mais d’être tout simplement bien à sa place en essayant de nuire le moins possible.

Déjà le sage chinois Lao Tseu disait, il y a plus de 2500 ans : « Content de peu, n’a rien à craindre, il préserve l’avenir du monde ». Cette citation est plus que d’actualité.

Ces personnes singulières se contentent de peu mais font avancer d’un grand bon l’humanité par leur observation et leur respect de la nature, voilà pourquoi ma philosophie est de parler d’eux et de vous les présenter si vous ils le souhaitent et que vous le souhaitez aussi ?

Alors bienvenue dans le club des Joyeuses et Joyeux ordinaires !

Notes et références :

1 : Revue Lévi-Strauss, l’ethnologie ou la passion des autres, magazine littéraire, hors-série, numéro 15, 2009

2 : Livre de Régis Airault, « Fous de l’Inde, Délires d’occidentaux et sentiment océanique », Payot, 2016

3 : Titre du film allemand. La vie des autres (Das Leben der Anderen), de Florian Henckel von Donnersmarck, 2006

4 : Titre du film indo-britannique, Gandhi, de Richard Attenborough, sur la vie de Mohandas Karamchand Gandhi, dit Bapu « Père » et Mahatma « Grande Ame », 1982

5 : Festival du Roc Castel, l’éloge du voyage lent (à vélo, à pied, en bateau à voile, en famille, avec des animaux, en train, en auto-stop etc.), initié par le cycliste Hubert MARTIN en 2010

6 : Sanskrit, langue ancienne du sous-continent indien, celle des textes religieux hindouistes, bouddhistes, jaïns et parfois sikhs.

7 : Celui qui fait le thé dans le monde indien (Pakistan, Inde, Bangladesh et par extension Afghanistan, Népal et Sri-Lanka)